PORTRAIT :
Christian Schmidt de la Brélie,
paritaire pour le meilleur...

Christian Schmidt de la Brélie est l’invité de La Lettre de l’Assurance pour le petit déjeuner off ce 25 février. L’occasion de revenir, avec lui, sur son parcours au sens large. Même si le professionnel prend rapidement le pas sur le reste…

Si vous ne le saviez pas, Christian Schmidt de la Brélie est fumeur. Régulier et constant. Passer une heure avec lui est donc la garantie de le voir griller, puisque ça ne nous gêne pas, quelques blondes, porte fenêtre ouverte sur la magistrale terrasse du tout neuf bâtiment de Klésia. En contrebas, des dizaines de voies de chemin de fer laissent parfois filer un RER. Face aux fenêtres et de l’autre côté des voies, plusieurs grues s’affairent à construire de nouveaux immeubles.
Le tabac lui a tanné la voix, la rendant grave et profonde, mais il sourit souvent, éclate de rire parfois et alors ses yeux se plissent ou point de disparaître derrière ses lunettes. Il pleut sur la terrasse et l’entretien se passera dans le grand bureau, avec une décoration faite de deux figurines Star Wars – un Darth Vader et un Stormtrooper – ainsi qu’une reproduction de la Grande Vague de Kanawaga, une estampe japonaise qui le suit depuis des années. « Je l’avais dans ma chambre », précise-t-il.

La guerre économique

Au moment d’aborder des sujets plus intimes que l’actualité du groupe et du secteur de l’assurance, sur lesquels il a des ressentis ainsi que des informations à livrer, Christian est moins détendu. Ses yeux sont moins rieurs, il se raidit. Mais puisqu’il faut y aller…
L’histoire commence le 24 juin 1969. « Je suis né à Belfort », explique-t-il, « dans ce petit territoire qui s’est fait rattacher au Jura en 1870 car le colonel Denfert-Rochereau avait résisté à l’invasion allemande ». Il garde d’ailleurs, sur son bureau, un exemplaire du Lion de Belfort qui se trouve place Denfert-Rochereau à Paris.
Suivant un père officier puis sous-préfet, Christian a beaucoup déménagé mais fait ses études à Paris. A-t-il imaginé faire carrière dans l’armée ? Si elle tient une bonne place dans l’histoire familiale, c’est moins le cas dans celle de Christian. « Autant la carrière militaire pouvait avoir un intérêt pendant qu’il y avait les guerres, mais les guerres se mènent aujourd’hui sur le champs économique ! », lâche-t-il en riant.

Il entre en école de commerce et travaille assez rapidement, à la faveur d’une négociation, déjà. « J’ai travaillé quasiment deux ans à temps partiel chez AXA » , se souvient-il, « j’avais l’avantage à l’époque d’être presque syndicaliste avant l’heure : j’étais président du bureau des élèves et nous avions un vrai contrepoids. Je m’étais alors entendu avec le directeur de l’école pour faire pratiquement de l’alternance, travailler à mi-temps et faire mes cours à mi-temps. »
Par envie d’entreprise ou de gagner sa vie ? « Les deux ! Par envie d’avoir plus d’argent pour faire la fête et parce que ça m’intéressait ! » Et il enchaîne avec une année à temps plein chez l’assureur, en 92-93, à la gestion d’actifs, avant de partir au service militaire.

Une caisse de retraite plutôt que les marchés financiers

Quand il revient, il répond aux offres d’emploi et cumule une réponse positive d’un groupe de caisses de retraite pour « reprendre le pilotage » du contrôle de gestion et de la banque Morgan Stanley pour un poste sur le matif (marché à terme international de France, de la finance de marchés ndlr). C’est finalement sa mère qui va précipiter les choses. Elle répond un jour à un appel sur le téléphone familial. Au bout du fil, un responsable de Morgan Stanley se voit opposer une réponse polie : « Elle lui a dit que c’était trop tard, que j’avais trouvé un boulot » explique Christian en explosant de rire. Le voilà donc parti pour la rue Bayard, « et non pour la Place Vendôme », dans l’association de prévoyance Bayard. Un regret ? « Non. J’étais déjà le vilain petit canard d’une famille de hauts fonctionnaires, mais la finance de marché, c’était peut-être un peu trop éloigné de mes valeurs quand même. »

Le jeune diplômé de l’IPAG trouve dans l’association de prévoyance Bayard un poste qui lui convient mieux. « Il y avait un certain management, du pilotage. À la différence du trading où on est plus ‘commerçant’ et qu’on se fait du cash tout de suite sans avoir de vision plus lointaine ni de management à faire, là c’était plutôt intéressant. » En 1993, il voit Jean-Jacques Marette arriver et prendre les rênes de la caisse et il assiste à son départ en 1996 pour l’ARRCO. Christian de la Brélie quitte la caisse peu après lui, fin 1996.

Il entre ensuite chez AG2R, à des « fonctions du contrôle de gestion, de comptabilité, d’audit et financières ». « L’organisation chez AG2R m’a donné l’occasion d’être patron d’une direction opérationnelle, en sus de mes fonctions plus financières, sur Bretagne Pays de Loire, Normandie, Picardie, Nord – Pas-de-Calais. C’était très intéressant car je touchais à la partie opérationnelle avec les problématiques du commercial sur le terrain, les back-offices, et de l’autre côté, j’avais les notions du point de vue fonctionnel groupe. » Il restera 10 ans et quittera le groupe aux prémices du rapprochement avec La Mondiale pour suivre une autre opportunité selon lui, chez D&O.

DG chez D&O, et plus si affinités

« D&O me rappelait le groupe dans lequel j’avais commencé. Ils avaient licencié les directeurs généraux, suspendus les CA, il y avait des choses à faire ! », sourit-il. Le poste de DG l’intéressait-il particulièrement ? « Être directeur général c’est très relatif, on peut l’être dans un groupe en étant l’équivalent d’un chef de service dans un autre. Ce qui me plaisait, c’était d’avoir à la fois les manettes de l’opérationnel et du fonctionnel, ça c’était sympa ! »
Le groupe était de taille modeste, et se trouvait face au passage à venir sur Solvabilité II, un vrai défi, « pas en termes de fonds propres, mais dans sa capacité humaine et dans sa taille ».
Avec cet objectif, les recrutements ont permis de constituer une équipe prête et partante pour le projet. « Le fait de travailler ensemble, de pouvoir s’appuyer sur une équipe, permet d’avoir des retours de la part des opérationnels et des échanges avec les politiques ».
Le groupe lancé, il fallait trouver une opportunité de rapprochement, « ce que j’avais identifié dès 2007 », annonce Christian.
Les proximités des branches HCR et transports, dans l’industrie pharmaceutique également, font pencher la balance vers le groupe Mornay, qui sort lui d’un rapprochement raté avec La Mutuelle Générale. Les accords politiques dans les branches avançant, le rapprochement se facilite.
S’ajoute également la MFP, pour la partie individuelle et la sortie de branche des salariés. Klésia voit alors le jour.

Le paritarisme chevillé au corps

Pourquoi rester dans le monde paritaire après AG2R ? « Ce que j’ai vu chez AG2R c’est que les branches sont un vrai lieu de dialogue. Quand on a des crises sur des négociations annuelles obligatoires de salaires, on ressort toujours par la protection sociale. Elle est déductible et permet d’avoir un suivi plus quotidien sur lequel les organisations syndicales et les DRH étaient toujours très au fait. »

Pas facile de sortir Christian du paritarisme, ni du travail finalement. Des hobbies ? « J’adore mes enfants et j’aime bien l’automobile », confie-t-il rapidement, avant de revenir très rapidement à la réglementation et aux réformes : « Quand je vois la dernière réforme de la retraite menée sous la houlette de Claude Tendil, je dis ‘chapeau bas’ ! Les partenaires sociaux ont réussi à faire tout ce que l’État lui-même n’a pas su faire. »
Tandis que le rendez-vous touche à sa fin, il poursuit sur les gouvernances paritaires, et les liens entre IP, les assureurs qui les réassurent, les mutuelles… Une vision marché, stratégique et globale qui ne semble jamais le quitter.
Quand nous essayons de plonger dans ses racines pour expliquer cette vision, Christian de la Brélie pense trouver la source. « Mon parcours d’enfance, sous les ors de la République, où rien ne vous appartient, où vous découvrez des logiques de cabinets ministériels et autres, ça vous apprend deux choses : que la roche Tarpéienne n’est jamais loin du Capitole et que derrière, il faut finalement essayer de créer de la valeur, de faire le bien ». Et comme souvent, le paritarisme revient dans la conversation… « Avec une spécificité du monde paritaire qui m’a toujours beaucoup importé, beaucoup plus de gens qu’on ne le pense aime faire le bien. On voit des postures politiques au niveau interprofessionnel et d’un syndicalisme de revendication, mais dans la pratique, quand je vois nos actions sociales, toutes les organisations se mettent autour de la table pour dire, ‘ok on y va’, et ça c’est plutôt pas mal. »
Paritaire de coeur, et pour le meilleur ?

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